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  • Photo du rédacteurDr Mazelin

Père : aussi touché par la dépression du post-partum

Dernière mise à jour : 2 août 2022

La dépression du post-partum fait partie des phénomènes dépressifs les plus tabous s’il en fallait.


Si on la connait mieux chez les jeunes mères, elle est totalement méconnue chez les pères.


Elle toucherait 13 à 20% des jeunes papas.

La dépression du post-partum ou postnatale peut se manifester durant l’année qui suit la naissance de l’enfant. Elle est à différencier du babyblues, qui est entrainé par la baisse des hormones dans les jours qui suivent la naissance. La dépression du post-partum en diffère aussi par sa durée et son intensité, elle peut nécessiter la mise en place de soins spécifiques.



Comme dit en introduction, la dépression du post-partum paternelle (ou DPP) est totalement méconnue et sujet de nombreux tabous car elle vient à l’encontre de l’image sociétale véhiculée encore autour de la position de l’homme au sein de la sphère familiale.


Même si les mœurs évoluent, certains choses persistent.

«Le stéréotype idéalisé du mâle fort et dominant, censé porter son foyer et résoudre ses problèmes seul, fait aussi que beaucoup d'hommes n'osent pas s'exprimer et encore moins consulter. Et quand ils le font, ce n'est pas forcément bien accueilli», rappelle Vincent Lapierre, psychologue et directeur du Centre de Prévention du Suicide (CPS).


Maman vient de donner naissance à la vie, toute l’attention est tournée vers elle et il convient de la soutenir dans ce changement. Le fonctionnement des maternités et les dernières périodes de COVID sont là pour nous le rappeler, la présence du père est accepté, mais ils ne font l’objet que peu d’intérêt voire peuvent être tenus à l’écart.

«Les pères expriment un sentiment d'exclusion des services de périnatalité et un manque de reconnaissance dans leur rôle de coparent. Ils questionnent leur légitimité à y être inclus, craignant le regard de la société et d'ôter des ressources à la mère et l'enfant», écrivent les sages-femmes Marie Guérin et Sarah Boccon-Gibod.


Pourtant ce changement n’est pas que maternel, mais aussi familial et donc paternel. Et il conviendrait peut être simplement de mieux appliquer les recommandations de l’OMS qui datent déjà de 2015.


En prenant le temps de s’attarder au ressenti émotionnel du père, on s’aperçoit donc de la forte anxiété en lien avec ce nouveau rôle. Anxiété qui prend son appui sur le fait qu’une naissance représente un des changements les plus forts dans une existence.



Devenir ou redevenir père est donc un changement radical où nouvelles (dés)organisations, manque de sommeil, sentiment de ne pas y arriver devant ces nouvelles responsabilités sont monnaies courantes.

Le congé paternel, jusqu’à son allongement récent en France, ne permettait souvent finalement que de se consacrer aux urgences liées à la venue du bébé et à aider la mère dans ce changement (tout aussi radical pour elle). Et encore ce congé paternel n’est possible en pratique que pour les salariés, les indépendants ne bénéficient d’aucune couverture correcte à ce niveau-là.


Le père durant ces quelques jours n’a pas le temps de se pencher sur ses propres émotions (et même si c’était le cas comment tout parent peut-il réellement le faire face à la tempête que représente l'arrivée d'un nouvel enfant ?). Pas le temps, pas l’habitude, pas l’envie et de toute façon pas dans les mœurs, les émotions sont tues et refoulées. Pourtant elles sont bien présentes.

La résultante peut être l’apparition d’un syndrome dépressif dans les mois qui suivent avec souvent une mise en retrait de la vie familiale et une certaine irritabilité.


Cette dépression paternelle du post-partum est souvent plus tardive que chez la femme et ne présenterait pas de risque direct d’infanticide. Mais elle peut être à l’origine de difficultés pour le père à tisser un lien de qualité avec son enfant, et ainsi elle pourrait être à l’origine d’un plus grand risque de maltraitance.


Les facteurs prédisposants pour l’homme, outre sa propre histoire personnelle, apparaissent être la présence au sein du couple d’une dépression maternelle du postpartum, une grossesse ou un accouchement compliqué, l’isolement familial, ainsi que l’existence d’une chute hormonale (la testostérone) dans les mois qui suivent la naissance d’un enfant.



La conclusion autour de ce sujet qui peut faire débat est bien la nécessité d’un meilleur accompagnement de l’ensemble de la famille par des professionnels de santé dans l’année qui suit une naissance, mais aussi ne pas négliger l’aide conséquente que représente un entourage familial proche au quotidien. Une problématique d’isolement finalement assez nouvelle, reflet d’une époque où les couples n’ont jamais été aussi isolés lors de l’arrivé d’un nouvel enfant.


Et si nous avons parlé ici de la période postnatale, il convient également de ne pas oublier la période prénatale qui peut engendrer un fort stress physiologique et psychologique chez la mère, mais également le père ! Une étude chinoise de 2019 révélait ainsi que 10% des pères présentait les signes d’un état dépressif durant la grossesse de leur compagne.


Article rédigé par Dr Loris-Alexandre MAZELIN


Sources :

Darchis, Élisabeth. « Le blues du père », Cyrille Guillaumont éd., Les troubles psychiques précoces du post-partum. Érès, 2002, pp. 79-94.

Debry, Mathilde. « La dépression post-partum touche un nombre inattendu de pères », Slate, 2022.

Dépression post partum du papa, Hellocare Patient.

Gressier F, Tabat-Bouher M, Cazas O, Hardy P. Dépression paternelle du post-partum : revue de la littérature. La Presse Médicale. 1 avr 2015;44(4, Part 1):418‑24.

Guerin M, Boccon-Gibod S. La promotion de la santé mentale des pères durant la période périnatale. 2018.


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